PIERRE DE MINUIT, 2025




Pierre de minuit rassemble un corpus d’images issu d’un travail de recherche plastique autour des transformations de la matière. Mon geste initie des mouvements que les matériaux poursuivent selon leurs propres lois. J’utilise le plâtre, issu de la pierre et transformé par le feu, le charbon et des pigments, mis en relation par l’eau et la chaleur. Ils sont soumis à la compression, à l’humidité et au refroidissement. Sous ces contraintes, la surface réagit. Elle se contracte, se fissure, s’ouvre ou s’affaisse. Des zones d’opacité émergent ensuite, des noyaux autour desquels la matière se rassemble sous l’effet de forces invisibles. Le noir gagne en épaisseur, absorbe et réfléchit la lumière. Certaines formes s’ouvrent comme des cratères, d’autres s’enfoncent vers un cœur obscur. Ces zones agissent comme des points de gravité, où le plein et le vide se confondent, où la surface se replie sur elle-même. Elles fonctionnent comme des micro-trous noirs, lieux de condensation, de retrait et d’attraction. Des fragments s’y déposent, des poussières s’y aimantent, des contours s’y dissolvent. La photographie prolonge le travail matériel par un déplacement d’échelle. Elle agit comme un outil d’approfondissement, donnant accès à des zones que le regard nu ne saisit pas, et révèle des tensions, des épaisseurs, des états intermédiaires, à la limite du palpable. Les images se situent dans un entre-deux, organique et minéral, proche de zones mortes, mais chargées d’une activité latente, comme traversée par une mémoire obscure, et insaisissable. Elles résistent à une lecture immédiate et engagent une expérience de la profondeur, de la densité et de la tension entre solidité et possible effondrement.